3 questions à Cyril de Sousa Cardoso

Cyril de Sousa Cardoso est entrepreneur dans l'univers du conseil et des start-up. Il est auteur et conférencier spécialisé sur les thèmes de la Créativité, de l'Innovation et de l'Intelligence Collective. Après un parcours dans l'univers des systèmes d'information, de la gestion de projets informatiques et des startups, il devient en 2015 directeur associé d'Audalom, spécialisé en Intelligence Collective et dans l'accompagnement à l'Innovation et à la transformation des organisations et des territoires. Il est cofondateur et Président du mouvement Innovation Commando qui ambitionne de diffuser auprès du plus grand nombre les clés de la créativité et de l'innovation. Impliqué dans le développement de plusieurs sociétés technologiques, il dirige depuis 2019 la start-up les Petits Bots qui développe des solutions d'agents conversationnels et d'intelligences artificielles à destination des organisations publiques et privées. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur le thème de l'innovation et expert en conduite de projets technologiques. 

PRELIGENS : On dit souvent que les métiers de 2030 n’existent pas encore. Auriez-vous un exemple de métiers liés à l’IA à nous partager ?

Cyril de Sousa Cardoso : Alors que les débats et études contradictoires se multiplient autour du sujet des emplois qui pourraient disparaître à la suite de l'essor des technologies d’Intelligence Artificielle, et plus récemment aux IA conversationnelles et génératives sous le feu des projecteurs, il convient de souligner que l’Histoire nous a montré que chaque révolution technologique engendre également la création de nouveaux métiers. Les débats de l’instant présent étant toujours soumis au biais consistant à rendre plus facile l’identification, au moment où émerge une nouvelle technologie, des emplois qui vont disparaître que ceux qui vont apparaître. 

En remontant à l'époque de la révolution industrielle, il était difficile de prévoir l'émergence du métier d'ingénieur ferroviaire. De même, l'invention d'Internet dans les années 50 a donné naissance à un écosystème professionnel totalement nouveau, de l'architecte du cloud à l'UX/UI designer et dont la présentation aurait paru bien étrange à n’importe quel économiste au milieu du siècle dernier. Il est donc difficile de prédire avec exactitude les métiers de 2030, mais une chose est certaine : des emplois dans des domaines comme l'éthique technologique, l'audit algorithmique et la formation sur les usages de l'IA vont se créer et se développer. À mesure que les décisions seront déléguées aux algorithmes, de nouveaux pans de métiers émergeront pour garantir la transparence, la justice et l'équité des systèmes IA, mais également leur diffusion.

Parallèlement, une industrie florissante du "Fait sans IA" (comme il existe aujourd’hui un marché du « Fait main ») ou de la "Détox digitale" pourrait voir le jour, en réaction à l'omniprésence technologique.

PRELIGENS : Pouvez-vous donner un cas d’usage de l’IA dans le management de demain ?

Cyril de Sousa Cardoso : Le management n'est pas qu'une question de chiffres et de graphiques et heureusement, il s'agit d’un art de l’interaction humaine. À ce titre, l'IA, bien utilisée, peut cependant jouer le rôle d'un assistant discret et efficace pour le manager. Des algorithmes avancés peuvent déjà aujourd'hui faciliter la gestion des calendriers, trier les mails prioritaires et même assister et rédiger des comptes rendus de réunions, optimisant ainsi le temps des collaborateurs et des managers. Mais au-delà de ces tâches quotidiennes, l'IA va également révolutionner le recrutement, l'accueil et l’intégration de nouveaux collaborateurs, ou encore l'évaluation et l’anticipation des risques de turnover, de burn-out ou de bore-out. Des systèmes d’IA générative vont concevoir des programmes de formation sur mesure, basés sur les compétences et aspirations de chaque employé, accompagner la gestion des talents et la prévision des emplois et des compétences. Le panorama est vaste, et de nombreux cas d'usage émergent déjà, laissant présager une multitude d'autres applications encore à inventer.

PRELIGENS : Les entreprises sont -elles prêtes à adopter l’IA comme outil de management ?

Cyril de Sousa Cardoso : L'IA ne viendra pas supplanter les managers, mais plutôt les assister. Nombre d'entreprises ont déjà commencé à adopter ces technologies, chacune à son propre rythme. Il y a les pionniers, les suiveurs, les hésitants, les sceptiques, voire les réfractaires. Toutefois, la popularisation des outils basés sur l'IA sera fortement influencée par leur efficacité à améliorer la performance globale et le bien-être des employés. Les entreprises qui s'engagent dans une démarche d'expérimentation et d'apprentissage continus seront celles qui tireront le meilleur parti de cette révolution. Ignorer l'IA aujourd'hui serait comme rejeter l'ordinateur ou l'Internet dans les années 80, cela destinerait irrémédiablement l'entreprise – ou le manager – à l'obsolescence.